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Schneidermann et l’hébreu :Entre confusionnisme et banalisation de l’antisémitisme

Les récents tweets de Daniel Schneidermann , figure historique du journalisme critique et de gauche, marquent une dérive extrêmement préoccupante.

En déclarant qu’en 2025, un chant en hébreu serait une « provocation insoutenable » parce que cette langue serait devenue celle « d’affameurs, de massacreurs, de barbares », il franchit plusieurs lignes rouges.

Tweet de Daniel Schneidermann le 25 juillet : "On en est là. En 2025, dans un lieu public européen, un chant en hébreu, langue revenu de l'enfer, devenue langue d'affameurs, d'assoiffeurs, de massacreurs, de barbares, est objectivement une provocation insoutenable. Soutien à Vueling."
Tweet de Daniel Schneidermann le 25 juillet : « On en est là. En 2025, dans un lieu public européen, un chant en hébreu, langue revenu de l’enfer, devenue langue d’affameurs, d’assoiffeurs, de massacreurs, de barbares, est objectivement une provocation insoutenable. Soutien à Vueling. »
Tweet de Daniel Schneidermann : "Sur l'hébreu : j'ai aimé cette langue, ressuscitée après l'extermination de l'enfer des camps. J'ai même, lycéen, commencé à l'apprendre. Elle est aujourd'hui pour le monde la langue d'une armée d'affameurs, de massacreurs, de barbares, qui répandent l'enfer à leur tour."
Tweet de Daniel Schneidermann :

« Sur l’hébreu : j’ai aimé cette langue, ressuscitée après l’extermination de l’enfer des camps. J’ai même, lycéen, commencé à l’apprendre.

Elle est aujourd’hui pour le monde la langue d’une armée d’affameurs, de massacreurs, de barbares, qui répandent l’enfer à leur tour. 1/2″
Tweet de Daniel Schneidermann : "2/2 J'en suis bouleversé pour le lycéen que j'étais. J'ai supprimé ce matin un tweet peut-être sincèrement mal compris par certains."
Tweet de Daniel Schneidermann : « 2/2 J’en suis bouleversé pour le lycéen que j’étais. J’ai supprimé ce matin un tweet peut-être sincèrement mal compris par certains. »

Ces propos viennent justifier, a posteriori, un événement qui s’est déroulé le 23 juillet au bord d’un avion au départ de Valence, de la compagnie VUELING.

A peine les passager.e.s embarqué.e.s, la police locale a été appelée pour expulser de l’avion une cinquantaine d’adolescent.e.s français.e.s et leurs accompagnateurices qui revenaient d’une colonie de vacances en Espagne organisée par l’association club Kineret.

Une des accompagnatrices encadrant le groupe a été arrêtée par la Guardia civil.

Une vidéo présentée comme celle de cette interpellation a circulé sur les réseaux sociaux, montrant une jeune femme plaquée au sol sans ménagement et menottée.

Deux versions s’opposent pour expliquer cette décision et l’association va porter l’affaire en justice.

Les membres de la colonie affirment que leur expulsion serait intervenue après que l’un des adolescents ait prononcé quelques mots en hébreu tandis que la compagnie affirme que certain.e.s d’entre elleux auraient manipulé de manière inappropriée du matériel de sécurité.

Et pourtant, pour Schneidermann, parler hébreu en public serait une provocation qui justifie l’expulsion d’un avion d’enfants mineurs et de leurs accompagnateurices avec l’intervention des forces de l’ordre.

Ses tweets s’apparentent à une validation implicite d’un acte de discrimination qui n’est même pas reconnu par la compagnie aérienne.

Ce n’est pas une critique politique, c’est une essentialisation

Une confusion délibérée entre la politique criminelle d’un gouvernement et une langue, une culture, un peuple tout entier.

Il opère une réduction abjecte : faire de la langue hébraïque, langue plurimillénaire, langue de la prière dans la religion juive, et des citoyen.nes israélien.ne.s, un symbole de la barbarie.

C’est une forme de confusionnisme dangereuse : l’assimilation entre un gouvernement et une langue, entre la politique d’un Etat, la nation qui la compose et une identité culturelle.

C’est un glissement vers la xénophobie et l’antisémitisme, par la négation de la diversité des locuteurs, la richesse de leur histoire, leur droit à exister et vivre librement en dehors des crimes de leurs dirigeants.

Ce n’est pas un écart de langage : c’est une contribution, fût-elle involontaire, à la banalisation du rejet de l’autre, en raison de son identité.

Le combat légitime et nécessaire pour la justice en Palestine et la fin de la guerre d’anéantissement menée par le gouvernement de Netanyahou et l’armée israélienne ne doivent pas être le paravent d’une parole qui légitime l’humiliation d’enfants juifs en raison de la langue qu’ils parlent.

La solidarité avec le peuple palestinien, ne saurait justifier que l’on tolère — voire célèbre — des actes antisémites. Et d’autant plus quand ils visent des adolescent.e.s.

Non, parler hébreu n’est pas une provocation.

Non, on ne peut pas faire d’une langue millénaire le symbole des crimes d’un État, ni faire de celleux qui la parlent des boucs émissaires.

Oui, il faut lutter contre l’oppression — sans reproduire les logiques de stigmatisation